LES ORIGINES DES RIGOLI

 

Origine étymologique du nom de famille:

 

               La base hydronymique pré-indo-européenne "Rek", phonème trilitère (consonne-voyelle-consonne) évoquant primitivement une idée de mouvement, tel le courant de l'eau du torrent ou de la rivière, est passée dans le domaine européen (italique, celtique, germanique), apportée peut-être par les migrants proto-celtes du Premier Age du Fer (X°-VIII° siècles av. J.-C.).

               Les Celtes proprement dits, arrivés aux VI°-V° siècles av. J.-C. dans le nord de l'Italie, ont continué de répandre cette racine chez les peuples italiques sous la forme, très employée par eux, de "Rico" : ruisseau.

               Ce thème celtique "Rico", a été ensuite latinisé et on lui a adjoint le suffixe diminutif -eolus -eola (-eoli au masculin pluriel) pour désigner les petits cours d'eau, les ruisselets.

               La langue romane succède au latin en le simplifiant : après affaiblissement du "c" intervocalique initial, prononcé "k" dur en langage celtique, adouci en "g", le double diphtongue central "oeo" s'est contracté en un seul "o" pour donner finalement "RIGOLI".

               On retrouve la base "Rek" pratiquement intacte dans le catalan "Rec": ruisseau, appellatif qui a fourni les dérivés "Rigat" (avec suffixe diminutif -atum) : nom commun jusqu'au Moyen Age, employé surtout en Cerdanya pour désigner un petit ruisseau utilisé pour l'arrosage des prés, et "Rigola" (avec suffixe diminutif -eola) : petit ruisseau, rigole.

               La même base "Rek" est à l'origine du flamand "Rickel" : fossé d'écoulement dans une étable, du néerlandais "Rigelen" : petit canal, provenant du moyen néerlandais "Regel" : rangée, ligne droite, après croisement avec le mot latin "Regula" : règle, et le verbe latin "Rigare" : arroser et qui a produit le français "Rigole" au début du XIV° siècle.

               Avec le suffixe collectif -etum, la langue d'oc formait le nom de "Rigolet", à rapprocher de l'italien "Rigoletto".

               Aujourd'hui, "il rigolo", au masculin singulier, donne "i rigoli", au masculin pluriel, avec le sens de rainures. Ce sont ces petits sillons tracés à leur surface qui ont donné leur nom aux biscuits "I Rigoli", frollini de la marque Mulino Bianco de Barilla.

 

                   Mais ce nom a pu désigner, au Moyen Age (après le X° siècle), le paysan connu pour son habitude d'irriguer ses prés par un réseau de petits canaux d'arrosage, les "rigoli". A partir du XII° siècle, ce nom de famille serait devenu héréditaire, comme les autres patronymes, pour être enfin fixé par l'état civil après le XV° siècle.

              

               Pour être complet, il convient de signaler que certains auteurs considèrent Rigol, Rigola, Rigole, Rigoli, comme des formes dérivées de Rigal, provenant du germanique "ric-wald": puissant gouvernement, ou de Rigaud, "ric-oald" : puissant ancien. Mais ces origines germaniques, nimbées de force, de pouvoir et d'autorité, caractériseraient bien mieux un robuste seigneur carolingien qu'un frêle paysan transalpin.

               C'est pour la même raison que l'on ne peut retenir l'évocation des débuts fortunés d'une lignée bourgeoise qui se serait enrichie dans le commerce des huiles : les "ricchi-oli", riches en huiles, à l'instar des Sageloly du Roussillon ou du Vallespir, et, plus particulièrement, de Céret, dont le patronyme provient de l'agglutination de "sagi" : saindoux et "oli" : huile, qui est à l'origine de ce surnom de marchand de matières grasses !

               Par contre, l'existence d'une localité de Toscane, située à quelques kilomètres au nord de Pise et dénommée Rigoli (I-56010 Rigoli [Pisa]) (commune de San Giuliano Terme), pourrait bien nous indiquer l'origine d'un nom de provenance, donné par ses nouveaux concitoyens à l'émigrant venu s'installer au pays. L'usage consistant à donner à celui qui arrive le nom du village d'où il vient est constant en anthroponymie et  "celui qui vient de Rigoli" serait très vite devenu tout simplement Rigoli.

               Dans ce cas, l’étymologie de Rigoli relèverait encore du domaine de l’hydronymie, non plus par l’intermédiaire de la base pré-latine "Rek", mais par celle d’un dérivé du latin "Rivus" (ruisseau, cours d’eau) , le diminutif  "Rivulus" (petit ruisseau), attesté antérieurement au VIII° siècle par le nom du lieu  "Plebs de Rivulo"(”peuplement vivant au bord d’un petit ruisseau”[de la rive gauche du Serchio]) , Rivulo devenant ensuite "Riguli" (mention en 1001 : " in Pago pisensi in villa vocata Riguli ") puis enfin le définitif "Rigoli" .

 

Origine historique :

 

               Cette origine d’un nom de provenance nous conduit donc à envisager l’hypothèse de l’émigration d’une famille toscane quittant Rigoli au cours du XIV° siècle pour chercher l’abri du refuge montagnard du Piémont.

               En effet, à cette époque, la Toscane souffre des dégâts causés par les guerres entre guelfes et gibelins. Les guelfes, partisans du pape, s’opposent aux gibelins, partisans de l’empereur, dans une lutte violente entre cités rivales (Florence, Sienne, Pise, entre autres) gouvernées par une aristocratie locale tantôt guelfe, tantôt gibeline. Cette rivalité aboutira, à la fin du XIII° siècle, à la toute puissance des Médicis et de Florence qui devient, après la chute de Pise, la capitale de la Toscane.

               A la ruine causée par la guerre vont s’ajouter les ravages infligés à la population par la grande peste de 1348. A Pise, c’est 70 % de la population qui succombe à l’épidémie !

               On comprend donc que nos ancêtres de Rigoli abandonnent leur paroisse de San Marco -dont l’église date du XII° siècle- pour aller chercher paix et sécurité, certes, mais aussi salubrité dans les vallées alpines.


 

Origines géographiques :

 

               En descendant du Simplon vers le lac Majeur, on rejoint la vallée du Toce qui reçoit, en dessous de Domodóssola, des affluents de rive droite provenant des deux vallées adjacentes du Valle d'Antrona, à hauteur de Villadóssola, puis , plus bas, du Valle d'Anzasca . En remontant cette dernière vallée vers Macugnaga, que domine le Mont Rose, on rencontre successivement les villages de Piedimulera, de Castiglione et de Vigino. C'est peu après cette dernière agglomération que l'on trouve Calasca où vivaient des Rigoli, du temps de la maison de Savoie et du Royaume de Piémont-Sardaigne.

               La famille de Bartholomé RIGOLI quitte alors Calasca pour chercher meilleure fortune sur les pentes bordant la rive droite du lac d'Orta, à Centonara. C'est là que son fils, Jean RIGOLI, se porte acquéreur, en 1783, de la nouvelle maison familiale, achetée aux enchères aux chandelles sur la place du village. On y vit de quelques châtaignes et de quelques chèvres, mais les conditions d'existence sont rudes et, dès le printemps revenu, les hommes ont l'habitude de passer en Suisse pour, durant toute la belle saison, gagner le bon argent que leur procure leur activité de maçon.

 

               Antoine, fils de Jean, se marie avec une fille PIERROZ, de Liddes, dans le Val d'Entremont, en Valais, entre Orsières et Bourg Saint Pierre, sur la route du col du Grand Saint Bernard. Leur fils, Augustin, naît, comme son père, à Centonara, et, maçon, comme son père, va épouser, comme son père, une suissesse du Valais, Mélanie CRETTON, native de Martigny-Bâtiaz, sur les bords du Rhône.

               Ils vont fonder une nombreuse famille dont les enfants, tous nés à Martigny-Ville, vont essaimer, pour certains au-delà des frontières helvétiques, à partir de la maison paternelle de la rue de la Délèze.

               L'aînée, Elise, émigrera en Italie où elle épousera un italien et se fixera à Milan. Le second, Antoine, émigrera en Angleterre où il épousera une norvégienne et se fixera à Londres. Les troisième et quatrième, Georges et Hermann, demeureront au pays, ainsi que le huitième, Marcel, qui deviendra propriétaire du Café des Alpes. Le cinquième, Jacques, dit Paul, émigrera en France et se fixera à Paris. Sa sœur jumelle, Anne, mourra en bas âge, à deux ans, et sa cadette, Emma, ne vivra que jusqu'à vingt-cinq ans. Deux jumeaux mourront à la naissance. Le dernier de ces onze enfants, Maurice, né avec le siècle, émigrera en France où il épousera une catalane et, après avoir séjourné à Paris, se fixera à Perpignan.

               Son fils, Jean, épousera une catalane et, carrière faite, se retirera à Céret, en Vallespir, où il entreprendra ces recherches sur sa famille.


Evolution du nom :

 

         Dans l’hypothèse d’un nom de provenance, sa forme, tout au moins orale, a pu être, à l’origine, "da Rigoli", sur le modèle de l’illustre "Leonardo da Vinci".

Après agglutination de la préposition et du toponyme, "Darigoli" a pu évoluer, par chute de la consonne initiale et redoublement du "r" intervocalique, à la première forme écrite "Arrigoli " attestée en 1450 à Calasca. Après cette date et au cours du siècle suivant, l’aphérèse habituelle de la voyelle initiale, entrainant la chute d’une des deux consonnes géminées, a abouti naturellement à la forme définitive "Rigoli" des Bartolomeo et Giovani qui se sont succédés à Calasca jusqu’à nos jours.

Tel ce Giovani RIGOLI, aimable octogénaire rencontré à Calasca le 19 septembre 2008 grâce à l’intervention de Don Andrea PRIMATESTA, archiprêtre de la paroisse, et détenteur d’une fabuleuse généalogie des RIGOLI remontant jusqu’à l’an 1500 !

 

Dispersion actuelle :

 

               Le noyau de la famille actuelle est symbolisé par la maison paternelle du 30, rue de la Délèze à Martigny-Ville, dont Hermann a hérité. Les descendants d'Hermann-père et de Marcel-père, ainsi que ceux de Georges, sont fixés au plus près, soit sur place, à Martigny même, soit à proximité, en Valais et en Suisse romande. Deux exceptions sont à noter : du côté d'Hermann, Bernard est en Turquie; du côté de Georges, Pierre-Marie est en France, dans l'Aude. Des deux descendants d'Elise, Guido était au Brésil, tandis qu'Alberto est resté dans la région milanaise, à Saronno. La postérité d'Antoine est demeurée en Angleterre et celle de Maurice en France, dans le Midi, au pied des Pyrénées.

               En dehors de la famille proprement dite, des RIGOLI ont fait souche en France, notamment en Haute-Savoie, dans les Alpes-Maritimes, le Doubs et le Jura. D'autres sont signalés à Marseille et, plus isolément, à Monaco, à Montpellier, dans l'Isère et en Corse.

 

               Mais nombreux doivent être ceux qui sont restés fidèles à leurs montagnes du Haut Piémont. C'est d'ailleurs dans la province de Novara que l'on trouve la plupart des quelque 1500 Rigoli restés en Italie, alors que l'émigration en recense 400 partis s'établir aux U.S.A. (surtout dans le Massachusetts), 200 en Suisse (surtout dans le canton de Vaud et en Valais), 175 en France (surtout en Haute-Savoie) et 125 en Australie (surtout dans l'Ouest du pays).

 

 

 

 


ANNEXES

 

DIAPORAMA

 

- Annexe n°1 : achat de la maison de Centonara -

 

            Adjudication d'une maison provenant de l'héritage de feu Giulio (Jules) GOVVINI de Centonara en faveur de Gioanni (Jean) RIGOLI résidant au dit lieu.

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         L'an de grâce 1783, le 25 du mois de février, à 18 heures, au lieu de Centonara, sur la place publique, conformément à la loi, devant l' Illustrissime Seigneur Avocat Don Nicolo Cattaneo, Châtelain et Juge de la Riviera, Mandataire de Son Excellence Révérendissime Monseigneur Don Marco Auveglio Balbis Bertoni, Evêque de Novara et Prince de la dite Riviera (suit longue liste de magistrats, de témoins et de procédure) s'est porté acquéreur Gioanni Rigoli, fils majeur de Bartolomeo, natif de Calasca, val d'Opsola, et résidant au dit lieu, qui a offert pour la dite maison le prix de 250 lires, 1 sou et 8 deniers du Piémont.

         Sur quoi, nous avons fait allumer la chandelle puis procédé à l'adjudication de la dite maison, après avoir, au préalable, donné le coup de trompette habituel et constaté l'extinction de la chandelle, en faveur du dit Gioanni Rigoli, en présence des susdits témoins et par l'entremise du Révérend Seigneur Curé du dit lieu Don Gioanni Battista Girardi en sa qualité d'exécuteur testamentaire du dit feu Giulio Govvini.

         Suit la description de la maison faisant l'objet de l'adjudication :

         Maison consistant, au rez-de-chaussée, en un portique, une cuisine avec foyer, une petite cour et un escalier pour monter à l'étage avec un petit palier, une loggia, une chambre, puis une autre chambre.

         Cette maison confrontant l'héritage de Gioanni Battista (Jean Baptiste) Ponti, Gioanni Battista Fusarelli, Monsieur Don Carlo Antonio (Charles Antoine) Ponti, et la rue communale, libre de toute charge et estimée à 250 lires du Piémont.

         Ont signé :  

Gioanni Rigoli ,

le docteur Francesco Buzzi, témoin ,

Giulio Fiorentini, témoin ,

Sr. Cattaneo, châtelain ,

et  Giambattista Borrone, Notaire Chancelier désigné

 

(Traduction très libre de l'italien piémontais du XVIII° siècle au français contemporain, par le Jean Rigoli du XX° siècle, descendant du dit Gioanni Rigoli).


- Annexe n°2 : achat de la maison de Centonara -

 

Suite à l'adjudication publique du 25 février 1783 à Centonara (annexe n° 1), un acte de vente a été dressé le 16 avril 1783 par le docteur Francesco Buzzi, Notaire à Orta, entre le Révérend Seigneur Don Gioanni Battista Girardi, Curé d'Artò, exécuteur testamentaire de feu Giulio Govvini et Gioanni Rigoli, acquéreur.

 

-        Annexe n°3 : rente faite par Gioanni Rigoli -

Rente faite par Gioanni Rigoli à ses héritiers nés de son premier mariage avec Rosa Maria Fusarelli, à savoir Bartolomeo, son fils, de Centonara, Maria Zoppetti née Giovanna Maria Rigoli, sa fille, épouse Bartolomeo Zopetti, de Centonara, et Carlo Giuseppe Ponti, son petit-fils, d' Artò, fils de Maria Maddalena Ponti née Rigoli, sa fille, et de Lorenzo Ponti, son gendre, le 2 mars 1804, en l'étude de Giuseppe Antonio Mina, Notaire à Orta.

         (mention du testament en date du 8 septembre 1803, reçu par le même notaire, de Giovanni Battista Fusarelli, de Centonara, instituant son légataire universel en la personne de son gendre, Gioanni Rigoli, époux de sa fille Rosa Maria Fusarelli, et liquidation du dit héritage après inventaire évalué à 360 lires pour chaque héritier)

 

-        Annexe n°4 : partage Carlo Fusarelli -

 

Partage des biens de Carlo Fusarelli, de Centonara, entre ses deux fils, Antonio et Giovanni Battista, le 12 février 1752 en l'étude d'Ignatio Rotario Sanseverino à Pella.

 

-        Annexe n°5 : testament Giovanni Rigoli -

 

Testament de Giovanni Rigoli, de Centonara, le 3 octobre 1822, passé en l'étude de Giovanni Battista Olina, Notaire, 49 alla Motta à Orta.

 

-        Annexe n°6 : quittance Giulio Ponti -

 

Quittance de 252 lires du Piémont reçues par Giulio Ponti, de Centonara, en faveur de Giuseppe Antonio et Giacomo Filippo, frères Rigoli, également de Centonara, par devant  Giovanni Battista Olina, Notaire Royal, 49 alla Motta à Orta, le 5 décembre 1838.

 

- Annexe n°7 : testament Giuseppe Antonio Rigoli -

 

Testament de Giuseppe Antonio Rigoli, le 6 octobre 1875, passé en l'étude de Ermenegildo Tachetti, Notaire Royal, casa Linotti, n° 93 entrada di Villa à Orta.

(mention du décès le 29 juin 1876, chez lui, à Artò : n° 2 registre des décès d' Artò; à 68 ans : maçon, né et domicilié à Artò)

 

 

Voir arbres généalogiques sur :

http://gw.geneanet.org/index.php3?b=jeanrigoli

http://www.genealogie.com/v2/genealogie-en-ligne/liens-familiaux.asp